You are currently viewing Proposition de loi visant à encadrer l’intelligence artificielle par le droit d’auteur

Le 12 septembre 2023, les députés de l’Assemblée nationale ont déposé une proposition de loi (n°1630). Celle-ci vise à « encadrer l’intelligence artificielle par le droit d’auteur ». Ainsi, les députés souhaitent, par le Code de la propriété intellectuelle, protéger la création et l’exploitation des œuvres d’arts générées par des systèmes d’intelligence artificielle (SIA). 

L’encadrement actuel

Actuellement, le Code de la propriété intellectuelle (CPI) n’établit aucune protection spécifique pour protéger ces œuvres générées par des SIA. Néanmoins, une protection générale est prévue à l’article L112-1 du CPI, permettant de protéger les œuvres. Cet article dispose que « les dispositions du présent code protègent les droits des auteurs sur toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination ».

Cette proposition de loi vise à modifier le Code de la propriété intellectuelle dans l’objectif d’insérer une protection spécifique afin de faire respecter les droits de ces artistes et auteurs.  

L’apport de cette proposition de loi 

Cette proposition vise à « contrôler strictement l’exploitation des œuvres générées par l’IA permettrait de collecter plus facilement les rémunérations perçues sur ces œuvres et de garantir une rémunération juste et équitable pour leur exploitation, contribuant ainsi à l’encouragement de l’innovation et à la promotion de la diversité artistique ». Pour ce faire, le texte se divise en quatre articles.  

  • Article 1 

Ce premier article vise à modifier l’article L.131-3 du Code de la propriété intellectuelle (CPI), qui encadre la transmission, l’échange, et la cession de droits de l’auteur. 

Les députés souhaitent ajouter un alinéa à celui-ci, qui disposerait que « l’intégration par un logiciel d’intelligence artificielle d’œuvres de l’esprit protégées par le droit d’auteur dans son système et a fortiori leur exploitation est soumise aux dispositions générales du présent code et donc à autorisation des auteurs ou ayants droit ». De ce fait, les œuvres créées grâce à l’intelligence artificielle ne pourront pas être intégrées, ni exploitées, sans avoir obtenu le consentement préalable de son auteur. 

  • Article 2 

Ce deuxième article pourra compléter l’article L321-2 du CPI, qui encadre les organismes de gestion collective permettant la défense des droits des auteurs en ester. 

L’alinéa proposé dispose que « lorsque l’œuvre est créée par une intelligence artificielle sans intervention humaine directe, les seuls titulaires des droits sont les auteurs ou ayants droit des œuvres qui ont permis de concevoir ladite œuvre artificielle ». Cette gestion collective sera confiée à des sociétés d’auteurs ou des organismes de gestion collective. 

Une hypothèse posait problème, lors des débats vis-à-vis de cet alinéa, à propos de la titularité des œuvres générées par une intelligence artificielle sans intervention humaine directe. En effet, dans cette hypothèse, l’auteur de l’œuvre semble donc être la machine. Pour répondre à cette question, les rédacteurs de cette proposition accordent la titularité aux « auteurs ou ayants droit des œuvres qui ont permis de concevoir ladite œuvre artificielle ». De ce fait, la titularité de l’œuvre revient au concepteur de l’intelligence artificielle ayant permis la conception de l’œuvre.   

  • Article 3

Ce troisième article vise à encadrer le droit de divulgation des œuvres générées par des SIA, aujourd’hui encadré par l’article L121-2 du CPI. 

La proposition ajoute un alinéa disposant que l’apposition de la mention « œuvre générée par IA » ainsi que l’insertion des noms des auteurs de l’œuvre pour celles qui seront générées par un système d’intelligence artificielle (SIA), seront obligatoires. 

  • Article 4 

Enfin, le quatrième article vise à compléter l’article L121-2 du CPI, qui légifère sur les droits de divulgation des œuvres après la mort de son auteur. Les députés souhaitent créer une taxation « destinée à la valorisation de la création au bénéfice de l’organisme chargé de la gestion collective ».  

Ainsi, une taxation des œuvres générées par le SIA pourra être imposée même si l’œuvre n’aboutit pas nécessairement au résultat souhaité. La proposition de loi dispose que « dans l’éventualité où une œuvre de l’esprit est engendrée par un dispositif d’intelligence artificielle à partir d’œuvres dont l’origine ne peut être déterminée, une taxation destinée à la valorisation de la création est instaurée au bénéfice de l’organisme chargé de la gestion collective désigné par l’article L. 131-3 modifié du présent code ». 

Conclusion 

Cette proposition s’inscrit dans un mouvement de développement des œuvres générées par des systèmes d’intelligence artificielle. Le législateur doit donc impérativement protéger les droits des auteurs et artistes qui utilisent ces SIA. De plus, cette proposition vise à assurer une rémunération juste et équitable des auteurs. 

Néanmoins, des difficultés d’application techniques sont déjà évoquées par la doctrine, principalement sur l’identification des œuvres utilisées pour obtenir le contenu généré par le SIA. En effet, certaines œuvres vont être inspirées ou utilisées d’autres œuvres préexistantes, la question se pose dès lors de la titularité des droits d’auteur.  À titre d’exemple, il a été récemment vu que l’intelligence artificielle pouvait reprendre une chanson préexistante et y insérer la voix d’un autre artiste afin de créer une nouvelle œuvre. Dans ce cas, les paroles, la mélodie appartiennent à l’artiste original de l’œuvre. Toutefois, un second artiste a repris cette œuvre originale afin de la modifier et d’en créer une nouvelle. La proposition de loi ne permet actuellement pas de répondre à la question de la titularité des droits dans ces hypothèses.  

Par ailleurs, le législateur devra vérifier la conformité de ce texte avec les exigences d’harmonisation de l’Union européenne qui prépare des textes en la matière. 

 

Jeanne CASAMATTA

M2 Cyberjustice – Promotion 2023-2024

 

Sources : 

http://www.adagp.fr/fr/actualites/une-proposition-de-loi-pour-mieux-encadrer-lia-par-le-droit-dauteur

https://www.alain-bensoussan.com/avocats/proposition-de-loi-intelligence-artificielle-et-droit-d-auteur/2023/11/23/

 

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