Le 16 mai 2023, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a communiqué les résultats de son plan d’action concernant les cookies et a fait apparaître les évolutions en matière de pratique sur les sites internet. La CNIL s’est penchée sur bien plus que la simple application des règles concernant les cookies. Elle a également analysé les évolutions des pratiques des utilisateurs en matière de gestion des cookies (ces fichiers déposés par un serveur sur le terminal de l’utilisateur lorsqu’il navigue sur des sites internet) et d’information.
Quel est le contexte de l’analyse menée ?
La CNIL a publié ses dernières lignes directrices et recommandations sur l’utilisation des cookies et des traceurs sur internet le 1er octobre 2020. Après une phase d’adaptation puis de répression à partir d’avril 2021, la CNIL a lancé une phase d’évaluation de ses lignes directrices et recommandations. Pour ce faire, la CNIL a sondé les utilisateurs mais a aussi utilisé son Laboratoire d’innovation numérique (LINC) pour suivre les pratiques de 1 000 sites à plus forte audience en France entre janvier 2021 et août 2022.
Evolution de l’utilisation des cookies tiers par les éditeurs de site internet
Les cookies tiers sont des cookies émanant d’un autre domaine que celui du site consulté ou d’un tiers, pouvant servir au bon fonctionnement du site comme à l’analyse de la navigation de l’utilisateur ou la collecte de certaines de ses données. Leur utilisation a été analysée par le LINC, et la CNIL a pu en tirer plusieurs informations. Tout d’abord, elle constate et se félicite de la baisse du nombre de dépôt de cookies tiers sur les sites internets avant l’expression du consentement de l’utilisateur. Elle envisage ainsi de maintenir ses efforts sur ce point, notamment pour les sites à forte audience.
La CNIL a aussi pu observer un recul du dépôt de cookies tiers en général, ce qui illustre notamment une baisse du traçage publicitaire des internautes sur internet. Elle indique par exemple que le nombre de tiers déposant des cookies sur les 1 000 sites à plus forte audience en France est passé de plus de quatre en moyenne en janvier 2021, à moins de trois en août 2022. De plus, 29% de sites ne déposaient plus aucun cookies tiers en avril 2022 contre 20% en janvier 2021.
Les pratiques des éditeurs les plus influents ont donc évoluées mais la CNIL reste tout de même prudente, notamment concernant le traçage des données de navigation sans consentement des utilisateurs par les acteurs de publicité ciblée. Elle va donc poursuivre ses contrôles.
Les contrôles de la CNIL en matière de cookies et traceurs
Si la CNIL a procédé à plusieurs vagues de contrôles, la plupart du temps elle ne sanctionne pas directement les auteurs des manquements. Ainsi, si huit sanctions ont pu être prononcées par la CNIL de 2020 à 2022, elles ont été prononcées contre des acteurs ayant le temps et les moyens de se mettre en conformité. En règle générale, la CNIL n’a pas eu besoin de prononcer de sanctions et s’est arrêtée à une simple mise en demeure. En effet, à partir d’avril 2021 et jusqu’à la fin de l’année 2021, la CNIL a prononcé 94 mises en demeure à la suite de 125 contrôles en ligne, toutes suivies d’une mise en conformité des éditeurs concernés.
Evolution des pratiques des utilisateurs concernant les cookies et traceurs
D’après les sondages menés auprès des utilisateurs par l’IFOP (Institut français d’opinion publique), il est clairement établi que ces derniers possèdent une compréhension bien plus étendue de ce que sont les cookies. En effet, 95% d’entre eux déclarent savoir ce que sont les cookies. De plus, les utilisateurs sont largement conscients des différentes utilisations de ces cookies. Cette prise de conscience s’est notamment développée grâce aux processus de recueil de consentement et aux informations qui y sont fournies, selon les observations de la CNIL.
Cependant, les sondages ont révélé que plus de la majorité des utilisateurs interrogés (68%) ont toujours un sentiment d’opacité sur les informations qui sont données par les sites notamment concernant la sphère publicitaire. Ces sondages font ainsi ressortir une certaine défiance des utilisateurs à l’encontre des éditeurs de sites internet.
C’est ainsi que le taux de refus des cookies a augmenté même si le taux d’acceptation reste élevé en 2022 (59%). Les sondages ont cependant aussi illustré l’augmentation du taux de paramétrage des cookies pour les utilisateurs réguliers d’internet, taux qui passe à 49% parmi les utilisateurs sondés en juin 2022.
Enfin, les sondages montrent que le refus des cookies ne fait pas ressortir les clivages habituels entre catégories socioprofessionnelles, d’âge ou de géographie. La CNIL tente ainsi de fournir une explication sociologique au refus des cookies, notamment par les populations les moins favorisées. En effet, pour elle le refus des cookies doit s’apparenter plutôt à un refus de l’exploitation économique des données appartenant aux populations les moins favorisées et non pas comme « l’apanage des catégories les plus économiquement favorisées ».
Les conséquences de ce bilan
La CNIL indique ainsi dans ce bilan sa volonté de continuer ses efforts de mise en conformité des sites internet par rapport à ses lignes directrices et recommandations. Elle n’indique cependant pas si la fréquence de ses contrôles va augmenter, ni si les sites des moindre ampleurs seront susceptibles de faire l’objet de contrôle à venir.
La CNIL fait aussi la publicité de son extension de navigateur internet, dénommée « CookieViz », qui permet aux utilisateurs de vérifier les cookies déposés mais aussi le nombre de tiers en déposant. La CNIL offre donc un outil supplémentaire d’information aux utilisateurs d’internet.
BAL Cassiopée
Master 2 Cyberjustice – Promotion 2022/2023
Sources :