Le directeur général des finances publiques Jérôme Fournel se réjouit de l’efficacité de cette nouvelle méthode de contrôle fiscal : “le taux de détection se situe au-dessus de 95 %”
L’État a conclu un contrat de plusieurs millions d’euros avec Capgemini, une entreprise de service numérique française, pour développer un algorithme afin d’identifier systématiquement les constructions et les piscines non déclarées. En outre, l’infrastructure cloud est fournie par Google. Ce projet permet à l’administration fiscale d’avoir recours aux technologies d’IA novatrices développées par des sociétés privées pour lutter contre la fraude fiscale.
Dans un contexte où les nouvelles technologies modifient les pratiques permettant le contrôle fiscal, des voix s’élèvent contre cette méthode. Certes, ces progrès sont à l’origine d’un taux de détection de fraude très élevé, ce qui est une avancée indéniablement efficace pour la lutte contre ce phénomène. Cependant, ces méthodes soulèvent des inquiétudes quant au droit à la protection des données personnelles et au droit au respect de la vie privée.
Les points clés du projet « foncier innovant » :
Le fonctionnement du projet :
Les algorithmes utilisent des images aériennes publiques de l’institut national de l’information géographique et forestière (IGN) pour extraire les contours des bâtis et des piscines.
Ensuite un traitement informatique identifie les constructions ou aménagements non déclarés et vérifie l’adéquation des déclarations des propriétaires aux images aériennes.
Le but du projet :
Selon Bercy, ce dispositif de lutte contre la fraude permet de répondre noblement aux principes d’équité et de justice fiscale des citoyens.
L’efficacité du projet :
L’expérimentation a abouti à des conclusions dans neuf départements en 2021 et la démarche a été déployée sur tout le territoire. Selon un article du Monde, le système pourrait imposer une taxe supplémentaire sur 20 000 piscines en 2022. En 2023, plus de 120 000 piscines non déclarées ont été découvertes.
Les inquiétudes associées à cette pratique :
Cette situation met en lumière plusieurs inquiétudes : l’exploitation de données provenant de prises de vue aériennes par l’administration fiscale dans le but de lutter contre la fraude, garantit-elle la protection des données personnelles du contribuable et celle du droit au respect à la vie privée ? Ce projet pourrait-il aboutir à une surveillance généralisée portant atteinte aux droits fondamentaux des contribuables ?
La question de savoir si cette méthode est compatible avec les impératifs de la protection des données personnelles et celle du droit au respect à la vie privée se pose en effet. Une étude réalisée par le Conseil d’État, intitulée « Intelligence artificielle et action publique : construire la confiance, servir la performance » évoque ces craintes.
En effet, le projet fait appel à des prestataires privés comme Google, connus pour ne pas respecter ces droits. Ajoutons que Google a été poursuivi par le Parquet national financier pour fraude fiscale aggravée… La sénatrice Cathy Apourceau-Poly a posé une question au sujet du projet « foncier innovant » à la Ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités locales. Inquiète, le sujet a été évoqué.
Toutefois, la Direction générale des finances publiques veille à ce que les partenaires privés n’aient pas accès aux données qui pourraient conduire à une violation d’un quelconque droit et garantit la confidentialité. Le gouvernement impose aux prestataires de services de s’engager sur des données ouvertes (IGN Maps uniquement), c’est-à-dire des données déjà accessibles.
Par ailleurs, seuls les contours du bâtiment visé et ses coordonnées géographiques apparaissent sur les photos aériennes. Les données sont ensuite traitées dans le système d’information sécurisé de l’administration fiscale. La Direction générale des finances publiques veille à ce que les prestataires n’aient pas accès aux données fiscales des contribuables français et que le traitement de ces données relève de la compétence exclusive de l’administration fiscale.
En conclusion, si l’IA permet à l’administration fiscale de lutter avec davantage d’efficacité contre la fraude fiscale, il convient de demeurer vigilant et de veiller à la présence de garde-fou garantissant le respect des droits fondamentaux des contribuables français.
Antoine Candau
M2 Cyberjustice – Promotion 2023-2024
Sources :
https://www.senat.fr/questions/base/2021/qSEQ210924535.html