En octobre 2020, la Banque Centrale Européenne avait publié un rapport lançant une consultation du grand public sur la question de l’euro numérique. Presque un an plus tard, en juillet 2021, elle annonçait le début de l’expérimentation de ce nouveau mode de paiement avec pour ambition de commencer son déploiement en 2024. Mais alors, qu’est-ce un euro numérique ? À quels enjeux doit-il répondre pour séduire les citoyens européens ?
L’euro numérique est présenté comme un moyen de paiement supplémentaire, au même titre que les billets et les pièces de monnaie. En revanche, s’agit d’un moyen de paiement dématerialisé. Tous comme les espèces, l’euro numérique sera, si le projet abouti, émis par la Banque Centrale Européenne et les banques centrales nationales des États de la zone euro. De plus, il a pour vocation d’être utilisé par tous, particuliers comme entreprises, partout et sans plafond.
La BCE, en observant le déclin de l’utilisation des espèces au profit des cartes bancaires et autres moyens de paiement dématérialisés, a mis cet enjeu au cœur de ce projet. Elle souligne tout de même que, l’euro numérique n’a pas pour vocation de remplacer les billets et pièces de monnaie. Toutefois, nous pouvons l’imaginer sans mal. En effet, le paiement dématérialisé apparaît plus pratique dans notre vie de tous les jours. Nous avons en permanence notre smartphone sur nous alors qu’il peut nous arriver d’oublier le portefeuille à la maison ou dans la voiture.
L’autre enjeu qui a permis à la BCE de construire son projet, tient dans le succès que rencontrent les crypto-monnaies et la volonté qu’exprime depuis quelques années l’Union européenne, d’être à la fois indépendante et de devenir un exemple de modernité pour le reste du monde.
Toutefois, comme le souligne la CNIL, pour que l’euro numérique soit un succès, il devra placer le respect de la vie privée de ses utilisateurs comme sa priorité numéro une. Et c’est maintenant, alors que la BCE en est à sa phase de réflexion et d’expérimentation, qu’il faut déjà se pencher sur cette question afin de respecter le fameux Privacy by design. Cela implique d’induire déjà dans sa phase de développement, les règles de protection des données personnelles de celles et ceux qui les utilisent. Pourtant, en matière de paiement, une question importante se pose : l’utilisation illégale de cette monnaie numérique. Comme l’a justement souligné, le GAFI, Groupe d’action financière, il faut réussir, dans le cadre du développement de l’euro numérique, à trouver le parfait équilibre entre respect de la vie privée et lutte anti-blanchiment et contre le financement du terrorisme (LCB-FT), tâche qui apparaît dès lors compliquée.
Ainsi, si l’euro numérique représente le futur de l’Union Européenne en termes de monnaie, lui permettant de concurrencer toujours davantage les monnaies étrangères, il semble également que son développement rencontre d’ores et déjà des freins tenant à satisfaire toutes les exigences de la conception d’une monnaie, et ce, afin de remplir les obligations du Règlement Général sur la Protection des Données de l’Union européenne, texte phare en matière de respect de la vie privée.
Laura STAHN
M2 Cyberjustice 2021-2022