You are currently viewing Le digital passeport pour le luxe

« If you adore me, Dior me » encore faut-il avoir les moyens suffisants pour le faire, ou peut-être la culture numérique adéquate ?

Les enseignes de luxe, réputées pour leur éternel perfectionnisme, ont succombé à l’ère du digital. Ce n’est donc pas pour rien que plusieurs écrivains, à l’instar d’Eric Briones dans son livre « Luxe et digital, stratégie pour une digitalisation singulière du luxe », se sont aventurés dans cette quête de compréhension du rapport naissant entre luxe et digital. 

  • Luxe et digital : les faux meilleurs amis ? 

De prime abord, la combinaison de ces deux mondes ne peut mener qu’à une incompatibilité. 

Qui y’a-t-il en commun entre une Tesla et une Rolls-Royce ? A priori, à part le fait que ces deux voitures partent d’un point A pour arriver à un point B, pas grand-chose.

La Rolls-Royce appuie son expérience sur son patrimoine, son vécu. C’est l’idée qu’en achetant une telle voiture on acquiert également une part de l’histoire. Et pour les plus ambitieux d’entre nous, c’est l’idée de devenir une partie de l’histoire. 

L’enjeu serait donc de trouver le juste équilibre entre la pérennité et le changement, l’intemporalité et les mises à jour. Cette idée peut sembler surréaliste et pourtant plusieurs maisons de luxe ont relevé le défi haut la main. 

A l’instar de : 

  • Louis Vuitton avec sa campagne de printemps-été 2016 « séries 4 » : 

Cette campagne, dirigée par Nicolas Ghesquière, a eu un succès énorme. La nouvelle égérie de « séries 4 » est un personnage virtuel. Lightning, l’héroïne, explore les possibilités d’un monde fantasmagorique, elle « symbolise l’exploration créative de la Maison, qui repousse les limites de la réalité et du rêve ». Selon un article publié par LVMH, l’union entre le monde de la mode et du numérique s’est faite même dans les détails en utilisant la réalité virtuelle à travers les casques VR pour une expérience client immersive. 

  • Prada VR (Virtual Reality Expérience) : 

Prada brise les barrières entre le réel et le virtuel. La maison a développé sa propre digitalisation à travers une expérience hors du temps. En effet, les clients peuvent visiter, n’importe où et n’importe quand, les boutiques ainsi que les articles de cette enseigne italienne « … De « toucher » et d’explorer de manière dynamique les vêtements et accessoires de la marque »

  • Hermès avec « la Maison Des Carrés » : 

Hermès ose et son public applaudit. Cette boutique virtuelle met en avant la signature de la Maison : sa collection de carrés de soie, qui sont des écharpes en soie carrées ornées de designs emblématiques. 

L’enjeu est de taille, « tacheter » les écharpes en soie par des pixels est un pari que la maison a relevé haut la main. En se réinventant ainsi, Hermès a même attiré une nouvelle clientèle connectée, jeune et toujours aussi exigeante.

L’union du luxe et du digital dépasse ces simples exemples pour feindre parfois l’irrationnel. 

  • Shudu Gram : du fantasme à la réalité 

Ce mannequin d’une beauté qui frôle le divin rejettera toutes propositions de séduction, pour une simple raison : elle n’existe pas.

Shudu Gram se revendique comme étant la “First Digital Supermodel”. Cet humain codifié à collaborer avec les plus grands. En effet, elle a posé pour Fenty Beauty, rejoint la Balmain Army, a collaboré avec Paco Rabanne et même avec Karl Lagerfeld… 

C’est drôle de constater que Shudu n’a jamais été assujettie à des dénigrations ni par rapport à sa couleur de peau ni à ses origines africaines. Ce constat relève des problématiques d’ordre éthique et moral. 

En effet, si Shudu était réellement humaine, aurait-t-elle eu le même succès ? On ne le saura peut-être jamais, mais ce qui est sûr c’est que l’immigration virtuelle est largement tolérée. 

  • « Le luxe post digital »  

Ce terme a été introduit par l’auteur Eric Briones dans son livre précédemment mentionné dans l’introduction de cet article.

L’écrivain estime que le luxe doit apporter sa propre « sagesse digitale », à savoir ne pas copier ce qui existe déjà, mais se réinventer tout en gardant son authenticité. En effet, le luxe doit toujours rester unique et singulier même en étant digitalisé. 

« Je ne crois pas du tout à l’ubérisation du luxe ». L’auteur estime qu’il n’y aucun rapport de force entre le monde du luxe et du digital. Le luxe post digital selon lui se base sur l’indépendance, la clairvoyance, la magie et surtout « le digital augmenté ». 

On entend par ce dernier, une proposition d’expérimenter le digital à travers son humanisation. En d’autres termes, c’est le fait d’apporter l’humain dans le digital et non le contraire, « civiliser le digital » et mettre l’humain au centre.

Cette version du luxe apporte avec elle sa propre clientèle. Homo Numericus, cet être humain dépendant des technologies numériques, se voit réinventer sa manière de vivre l’expérience du luxe, mais toujours avec le même degré d’exigence. 

La majorité des adeptes de ce type de luxe sont des Chinois et ceci s’explique pour maintes raisons : 

  • L’hyper connectivité de la jeunesse chinoise : un air de fraîcheur longtemps recherché par certaines maisons de luxe. En effet, en prenant des célébrités plus « jeune » comme égérie, l’effet de masse se réalise presque instinctivement.
  • La Chine est le pays qui compte aujourd’hui le plus de millionnaires femmes : le strong independent women, n’est pas qu’un slogan, mais une réalité chinoise qui fait le bonheur des maisons de luxe.
  • Les Chinois adorent les marques de luxe, il y voit de l’élégance, de l’exotisme, de la sobriété mais surtout de la liberté. Qui peut leurs en vouloir pour ça ? 
  • Ils connaissent les nouvelles technologies mieux que personne : en effet, la plupart ont fait fortune dans ce milieu, ils sont presque les pères fondateurs de la tech. 

Peu importe la raison pour laquelle on est fasciné par le luxe ou la personne qu’on devient/souhaite devenir en intégrant cette famille, le digital a su se nicher au cœur des plus grands pour, peut-être, lui aussi faire partie de l’histoire de ces maisons particulières.  

 

Ameni EL AMRI

M2 Cyberjustice – Promotion 2023/2024

 

Sources : 

https://www.lvmh.fr/actualites-documents/actualites/nouvelle-campagne-series-4-louis-vuitton/ 

https://www.prada.com/ww/en/pradasphere/special-projects/2020/prada-vr.html 

https://www.vogue.fr/mode/mannequins/story/qui-est-shudu-premier-supermodel-digital-et-egerie-fenty-beauty-influenceuse/1767 

https://www.journalduluxe.fr/fr/mode/la-balmain-army-accueille-trois-nouvelles-top-modeles-virtuelles 

 https://www.instagram.com/shudu.gram/?hl=fr

https://www.puzzleparis.com/2019/10/30/la-nouvelle-cliente-type-du-luxe-est-chinoise-et-c-est-une-self-made-woman/

 

A propos de Ameni El Amri

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.