Le verdict du procès tant attendu en matière de contrefaçon virtuelle est tombé le 8 février dernier. Cette affaire a été suivie de près par beaucoup puisqu’elle représente l’un des premiers et plus importants procès impliquant une affaire de contrefaçon de biens réels dans le monde virtuel et de la technologie blockchain.
Pour rappel, Hermès a poursuivi l’artiste Mason Rothschild en janvier 2022 pour la création, la publicité et la vente d’une collection de NFT de sacs à main nommée « MetaBirkin », ce qui a été détaillé dans un précédent article : https://cyberjustice.blog/2023/01/26/le-proces-hermes-mason-rothschild-premiere-affaire-de-contrefacon-virtuelle/ .
Le procès s’est ainsi ouvert le lundi 30 janvier 2023 à New-York et le tribunal fédéral de Manhattan a rendu son verdict le 8 février dernier, soit neuf jours plus tard.
Quel est le verdict ?
Mason Rothschild a été jugé coupable des trois chefs d’accusation suivants : contrefaçon, dilution de marque et cybersquatting.
Il a ainsi été condamné à verser 133 000 dollars de dommages et intérêts à la maison Hermès.
Quelles sont les règles de droit sur lesquelles le tribunal fédéral de Manhattan s’est basé pour rendre son verdict ?
Au sujet de la contrefaçon, le propriétaire d’une marque correctement déposée dispose d’un droit exclusif sur celle-ci. En droit américain, c’est la loi Lanham qui protège les marques de la contrefaçon. La cour fédérale de Manhattan a ainsi déclaré l’artiste coupable de contrefaçon.
S’agissant de la dilution de marque, elle se produit « lorsque que le capital de la marque d’une entreprise diminue en raison d’une extension de marque infructueuse, qui est un nouveau produit que l’entreprise développe dans une industrie dans laquelle elle n’a aucune part de marché. ». En soi, elle se produit dès lors qu’une marque perd de la valeur après qu’une autre entreprise ait lancé un produit ne correspondant pas à sa vision, sa mission ou ses compétences.
Le droit américain impose certaines conditions afin qu’elle soit caractérisée, tel que la célébrité et la distinctivité de la marque ou encore que la seconde marque soit apte à entraîner une dilution, que ce soit par affaiblissement ou ternissement.
Ainsi, le tribunal fédéral de Manhattan a déclaré l’atteinte à la valeur de la marque comme caractérisée, et donc l’artiste est coupable de dilution de marque.
Concernant le cybersquatting, le tribunal fédéral de Manhattan indique que l’artiste numérique a largement profité de la notoriété de la marque Hermès ainsi que de son nom pour vendre ses NFT sous un nom identique.
Précisément, l’artiste a été condamné à verser à la maison Hermès 110 000 dollars pour violation des droits de propriété intellectuelle ainsi que 23 000 dollars pour cybersquatting.
Le tribunal fédéral de Manhattan a ainsi considéré que les agissements de Mason Rothschild n’étaient pas protégés par le principe de la liberté d’expression contrairement à ce que l’artiste invoquait.
Cette décision va donc faire office de jurisprudence pour les prochaines affaires et marque un tournant majeur dans l’encadrement des univers virtuels.
« La bataille est loin d’être terminée »
« Les choses ne sont pas allées dans mon sens mais la bataille est loin d’être terminée. Je suis fier d’être en avance sur les choses, y compris sur le Web3, et parfois cela s’accompagne de douleurs comme celle-ci ». Voilà ce que l’artiste arguait sur son compte Instagram au lendemain du procès.
Il n’est donc pas certain que l’affaire soit terminée, il y a de grandes chances que Mason Rothschild fasse appel de cette décision.
Cloé BORDE
M2 Cyberjustice – Promotion 2022/2023
Sources :
UNITED STATES DISTRICT COURT SOUTHERN DISTRICT OF NEW YORK Hermès c/ Mason Rothschild, February 8th 2023 : https://storage.courtlistener.com/recap/gov.uscourts.nysd.573363/gov.uscourts.nysd.573363.144.0.pdf
https://www.marieclaire.fr/hermes-mason-rothschild-proces-nft,1442538.asp
https://fourweekmba.com/fr/dilution-de-la-marque/
https://metavers-tribune.com/hermes-gagne-un-proces-historique-sur-les-nft-metabirkin/
