En 2023, neuf français sur dix sont connectés à internet. Parmi eux, 82% des 12 ans et plus s’y connectent chaque jour. Le cyberespace devient notre nouvel espace de vie, notamment celui des adolescents. Alors, l’expérimentation « pause numérique » aurait pour aspiration de reprendre le contrôle des écrans des plus jeunes.
C’est l’article L511-5 du Code de l’Éducation qui interdit en principe l’usage du téléphone portable au sein des établissements scolaires. L’exception de l’usage du numérique doit avoir des fins pédagogiques. En pratique, la règle est contournée par les élèves et le but est de récupérer la surveillance des écrans des plus jeunes, et, implicitement, redonner crédibilité à la loi précitée.
Qu’est ce que la « pause numérique » ?
Le lundi 2 septembre 2024, près de 200 collèges ont fait l’objet de l’expérimentation « pause numérique ». C’est un dispositif communiqué par la Ministre démissionnaire de l’Éducation Nationale, Nicole Belloubet, lors de sa conférence de rentrée le 27 août 2024. Les collégiens doivent éteindre et ranger leurs smartphones dans leurs sacs et les laisser dans des casiers à l’entrée de leur établissement scolaire.
Quels sont les motifs de l’expérience « pause numérique » ?
En premier lieu, c’est une réponse aux violentes agressions subies par deux collégiens, début avril 2024, au sein d’un collège de Viry –Châtillon et de Montpellier, causant la mort de l’un des deux élèves. La cause de ces agressions serait liée à l’utilisation des réseaux sociaux par les adolescents.
En second lieu, c’est une réponse aux conclusions du rapport de la « Commission Écran » remise au Président de la République Emmanuel Macron le 30 avril 2024. Les experts considèrent que c’est de la phase intra utéro jusqu’aux 25 ans que le cerveau humain est le plus élastique, permettant d’acquérir les facultés les plus cardinales telles que « le langage, puis plus tard, les apprentissages scolaires. ». Il serait alors nécessaire de protéger les adolescents pendant la période la plus propice à leur épanouissement. En effet, une trop grande exposition aux écrans peut donner lieu à certaines maladies. Par exemple, la « nomophobie » se manifeste par une angoisse accrue de se détacher de son téléphone portable ou d’être privé de connexion internet.
Quels sont les objectifs de la « pause numérique » ?
L’aspiration du test est l’usage « d’un numérique pédagogique ». Il est alors possible de trouver une cohérence avec les dispositions du Code de l’Éducation, notamment au regard de son article L312-9. Ce dernier est en principe favorable à l’utilisation des outils numériques dans un cadre de formation scolaire.
L’enseignement se base sur la sensibilisation portée sur « les droits et devoirs de l’usage d’internet et les réseaux » accompagné d’une certification, comme le prévoit son alinéa 3. Ainsi, le test va de pair avec « la stratégie du numérique 2023-2027 » du Ministère de l’Éducation et de la Jeunesse, aux fins de permettre aux élèves de devenir « des citoyens éclairés ».
Nous pouvons retrouver à titre d’exemple le programme « pHARe » étant un plan de prévention de cyber-harcèlement contenant dix heures de sensibilisation annuelle du CP à la terminale. L’objectif se manifeste aussi par un affermissement d’une éducation portée sur l’esprit critique au regard des informations émises sur internet.
Les limites à l’expérience :
L’expérimentation pourrait bien se heurter à la réalité pratique lui posant quelques limites. Récupérer et redistribuer près de 500 téléphones quotidiennement semblerait utopiste.
Les limites budgétaires font aussi partie du débat : le Président des Départements de France, François Sauvadet, évoque une somme qui pourrait s’élever à « 125.640.000 euros pour les 6.980 collèges de France », tout en dénonçant l’incapacité financière des Départements à investir dans des dépenses sociales.
Une généralisation envisagée pour janvier 2025 :
Une généralisation de l’expérimentation était prévue pour janvier 2025 par l’ancien ministère. Or, la nouvelle Ministre de l’Éducation Nationale Anne Genetet souhaiterait donner « une forme d’autonomie aux établissements ». Nous présumons alors que les téléphones portables ne seront pas prohibés dans tous les collèges d’ici début 2025.
BENYAHIA Nadia,
Master 2 Cyberjustice, Promo 2024-2025.
Sources :
https://www.elysee.fr/admin/upload/default/0001/16/06a9854b34d98bb3e4fbf72b2b28ed3b0dd601a1.pdf
file:///C:/Users/lenovo/Downloads/stratégie-numérique-ducation-2023-2027-120418-2.pdf