You are currently viewing La cyberprostitution, un lourd enjeu de cybercriminalité

Plus de six ans après l’adoption, en France, de la loi dite de « pénalisation du client », la prostitution sur Internet, quant à elle, demeure en pleine expansion.

 

L’expansion de la prostitution en ligne  

Bien qu’évoquer le terme de « cyberprostitution » ou « d’excorting » est souvent confondu avec le phénomène des cam-girls et des cam-boys (c’est-à-dire des personnes se « livrant devant leur webcam à des actes sexuels » contre rémunération), il convient de préciser que la prostitution revêt, lorsqu’elle se déroule en ligne, une pluralité de formes.  

Selon, l’association abolitionniste « le Mouvement du Nid », 62% de la prostitution passe, en France, par l’Internet. Ce dernier a engendré le développement d’une forme de « cybersexe » qui est devenu l’un des principaux générateurs de revenus sur la toile. 

Par conséquent, le racolage ainsi que le proxénétisme ou encore la pédophilie qui sont strictement interdits (contrairement à la pornographie) ne se trouvent plus uniquement dans les rues mais aussi sur l’Internet. 

 

La prostitution en ligne, une lutte complexe 

Ainsi, en se déroulant en ligne, ces phénomènes brouillent les frontières des pays et favorisent l’apparition d’une criminalité organisée face à laquelle les législations ne sont pas toujours adaptées et les autorités, impuissantes, se heurtent à la souveraineté des États.  

Au sujet du racolage en ligne, une difficulté de distinction persiste car la frontière entre celui-ci et le site de rencontre ou le site pornographique est difficilement déterminable et s’appréciera donc in concreto.

Dans l’hypothèse où une personne dénudée proposerait, en ligne, des services à caractère sexuel moyennant rémunération, le racolage sera caractérisé. 

Par ailleurs, la répression est complexifiée par le fait que les sites hébergeant ces contenus sont souvent hébergés dans des « cyber-paradis », des pays où la législation est plus douce. 

En revanche, s’agissant du proxénétisme, la complexité réside dans la transnationalité du phénomène ainsi devenu délicat à démanteler.

Ce dernier prend une importance telle, qu’en 2018, plus de la moitié des réseaux de proxénétisme démantelés opéraient exclusivement sur des plateformes en ligne.

Un site web support de proxénétisme ne peut donc être qu’illégal et l’éditeur du site sera considéré comme proxénète. 

Internet représente également un instrument pratique pour les proxénètes pratiquant le trafic d’humains ou encore le recrutement de prostitué(e)s étranger(e)s.

À ce titre, des enquêtes d’Europol et d’Interpol avaient établi un lien entre les parcours de migrants et les filières de traite en Afrique, au Moyen-Orient, en Europe mais aussi en Asie. 

Pire encore, il y a peu de temps, en France, des mineures de 8 ans ont été mises en vente par l’Etat islamique sur Twitter pour être réduites en esclavage sexuel. 

Omettre d’évoquer la cyber-prostitution des mineurs ou encore les réseaux pédophiles apparaitrait, en l’occurrence, impertinent.

Bien que la pornographie d’adultes en ligne apparaisse comme un « business des personnes juridiquement responsables », les images pornographiques des mineurs, en revanche, résultent bien souvent de la contrainte, de la violence et de l’abus de personnes en situation de faiblesse. 

Étant majoritairement le fait de pédophiles, la diffusion de telles images sur le web constitue un délit. Néanmoins, la diffusion et le recel de pornographie infantile sur Internet se distinguent de l’utilisation de l’Internet aux fins de préparer ou de commettre les atteintes sexuelles sur des mineurs.

S’il n’existe pas, en droit français, une infraction la décrivant spécifiquement, l’utilisation d’un réseau de télécommunication à cet effet constitue toutefois une aggravation de la peine. 

 

Une évolution législative nécessaire 

C’est ainsi, qu’Internet s’est transformé en un vecteur en matière d’exploitation sexuelle et a parallèlement favorisé l’apparition d’un trafic d’êtres humains forcés à la prostitution.

Si le Digital Services Act (DSA), plus précisément le règlement européen régulant les services numériques en ligne, s’attache à limiter les contenus illicites en ligne, pour l’heure, seule la Convention de Budapest sur la cybercriminalité apparaît réellement efficace. À cet égard, elle constitue un véritable cadre pour la coopération internationale, oblige les États à adapter leurs législations face aux enjeux des nouvelles technologies et impose des procédures facilitant les enquêtes.

 

Ainsi, pour Myriam Quéméner, magistrate française et experte auprès du Conseil de l’Europe en matière de cybercriminalité, il faudrait « faire adhérer les pays à la Convention sur la cybercriminalité », « définir une politique pénale en la matière, mettre en route une meilleure coopération internationale » ou encore « renforcer les formations pluridisciplinaires sur les aspects juridiques et techniques ».

 

Lucia Berdeil 

M2 Cyberjustice – Promotion 2022/2023

 

Sources :

 



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