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You are currently viewing Proposition de la Commission européenne visant à l’amélioration des conditions de travail des personnes exerçant leur activité via les plateformes en ligne

Le 9 décembre 2021, lors d’un communiqué de presse, la Commission européenne énonçait une série de propositions ayant pour but l’amélioration « des conditions de travail des personnes travaillant via une plateforme de travail numérique et à promouvoir une croissance durable des plateformes de travail numériques dans l’Union européenne ».

Selon la Commission européenne, « plus de 28 millions de personnes dans l’UE travaillent par l’intermédiaire de plateformes de travail numériques ». L’institution estime qu’elles seront 43 millions en 2025. C’est dans ce contexte de nécessité d’encadrement du travail en ligne, et notamment du travail via les plateformes, que les ambitions de la Commission européenne naissent. En effet, le travail en ligne, via essentiellement la création de contenu, a pris une place prépondérante dans la vie des utilisateurs de ses plateformes et des entreprises qui les détiennent.

La Commission européenne, avec ce communiqué, a pour objectif de préparer à l’établissement de nouvelles normes permettant la reconnaissance et l’identification de ces nouveaux métiers. Pour la Commission, il était important de communiquer sur ces nouvelles règles qui permettront aux personnes travaillant via les plateformes en ligne de jouir du droit du travail et des prestations sociales qui en déroulent. En effet, cette manière de travailler étant nouvelle, bien qu’acceptée et développée depuis des années, les concernés avaient du mal à appréhender la réglementation applicable, et même savoir si la réglementation en vigueur dans le domaine était applicable.

De plus, la mise en place d’une telle régulation selon la Commission européenne permettra à ces travailleurs de ne plus subir les changements et conditions des algorithmes mis en place par les plateformes : algorithmes qui agissent en l’espèce comme des organes de direction et donc modèlent la manière dont ces travailleurs exercent leur métier. A titre d’exemple, de nombreux utilisateurs de YouTube, non pas les utilisateurs classiquement entendus comme ceux regardant les vidéos, mais ceux créant des vidéos, se plaignent régulièrement des conditions d’utilisateurs de la plateforme (notamment en matière de censure de certains contenus) et de l’opacité des algorithmes qui régulent les contenus (par exemple les vidéos mises en avant par la plateforme ou celles rémunérées de manière plus importante).

A cette date, la Commission proposait donc trois voies pour améliorer les conditions de travail des personnes travaillant via les plateformes en ligne :

  • Une communication sur la vision de l’Union européenne de la situation, qu’elle souhaiterait mettre en place via des normes européennes, complétées par les règles que devront établir les États membres en la matière, pour pouvoir idéalement ajouter à cela un socle commun mondial en matière de droit du travail, et précisément de droit du travail sur les plateformes en ligne.
  • Une proposition de directive pour déterminer le statut professionnel de ces travailleurs, et les règles qui leur seront applicables en tant de travailleurs indépendants, ou non, selon la qualification qui sera donnée à la plateforme (employeur ou simplement hébergeur) et la place des algorithmes dans la vie professionnelle du travailleur.
  • Un projet de lignes directrices basées sur l’application du droit de la concurrence de l’Union européenne au domaine du travail sur les plateformes en ligne par les travailleurs indépendants sans salariés.

La directive ayant pour objectif l’amélioration des conditions de travail des personnes exerçant leur activité via les plateformes en ligne pose trois axes.

Premièrement, est en discussion le statut professionnel. La Commission européenne souhaite par cela que « les personnes exécutant un travail via une plateforme de travail numérique se voient accorder le statut professionnel juridique correspondant à leurs modalités de travail réelles ». Pour cela, elle fournira une liste de critères permettant de déterminer si la plateforme peut être considérée juridiquement comme un employeur ; si tel est le cas, des droits en tant que salariés seront accordés à ces travailleurs comme la négociation collective, le salaire minimum s’il existe, la protection du temps de travail, etc. De telles régulations procureraient à ces travailleurs de réelles améliorations des conditions de travail, considérées encore actuellement comme précaires en raison de l’instabilité de ce dernier, dû au manque d’encadrement en la matière.

Deuxièmement, un volet sera voué à la gestion des algorithmes appliqués à ces travailleurs en imposant notamment aux plateformes d’accorder un droit de contester les décisions automatisées, droit soulevé depuis des années par les travailleurs de ces plateformes se plaignant de l’application des algorithmes.

Troisièmement, la régulation portera sur une obligation d’application, de transparence et de traçabilité des conditions d’emploi de ces travailleurs par les plateformes, afin que des contrôles du respect du droit du travail en la matière puissent être effectués.

Pour conclure, il s’agira donc d’observer à l’avenir les normes qui pourront être édictées par l’Union européenne afin que les conditions d’exercice de ces activités numériques, auparavant considérées comme atypiques, mais concernant maintenant une part importante de la population européenne, soient enfin améliorées et encadrées.

Lorie Masdieu

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