/Users/popopol/Downloads/106473046_1373124409540071_1580168330295124626_n.jpg

Acheter de la drogue aujourd’hui n’a jamais été aussi simple grâce à l’ubérisation du trafic et l’utilisation des nouvelles technologies. Il est désormais possible de se faire livrer du cannabis ou de la cocaïne comme on se fait livrer une pizza. 

  • Une nouvelle forme d’économie au service des trafics de drogue  

Née sur le terrain de fond de l’économie collaborative, l’ubérisation est une nouvelle forme d’économie qui se fonde sur une désintermédiation de la chaine économique au profit d’un contact plus direct entre le producteur et le client (modèle horizontal), et ce de manière quasi instantanée grâce à l’utilisation des nouvelles technologies. Cette nouvelle forme d’économie que l’on retrouve aujourd’hui partout (déplacements, nourritures, vêtements…), n’a pas échappé au trafic de drogue.

Il est désormais aussi simple d’acheter de la nourriture sur une application comme « UberEats », que d’acheter de la drogue. Il suffit, en quelque clics sur les réseaux sociaux comme « Snapchat », de rentrer en contact avec un dealer en y ajoutant son « pseudo » et la drogue que l’on souhaite, puis d’attendre que le livreur envoie un message lorsqu’il est en bas de chez soi avec la commande. Il n’est plus nécessaire de se déplacer et de se rendre dans les cités, puisque tout est dématérialisé. Aussi, les réseaux de trafic de drogue sont de mieux en mieux structurés.

Comme le détaille le procureur de la République de Paris, Rémi Heitz, dans une interview pour le journal l’Express, « nous avons affaire à des organisations criminelles qui empruntent les méthodes de la grande distribution. Elles privilégient la segmentation du marché, le cloisonnement des tâches et l’utilisation de technologies de pointe ». Les dealers ont ainsi adapté leur moyen de transport et leur manière de vendre à cette nouvelle forme de commerce 2.0, ce qui leur permet de passer plus facilement entre les mailles de la police. 

  • Un nouveau défi pour l’Ofast

Avec l’ubérisation du marché de stupéfiants, il devient de plus en plus difficile de remonter les filières de trafic de drogue, ce qui complique le travail de la police. Comme en témoigne le rapport de l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies (OFDT) de 2019, l’offre de drogue connaît une dynamique de renouvellement continue, liée notamment à l’ubérisation de son trafic. Le dealer est aujourd’hui un vrai commerçant. Il est au fait des dernières tendances marketing pour fidéliser la clientèle et propose, pour booster la vente, des cartes fidélités, des promos ou encore des tombolas.

Les quantités de drogue saisies sont le signe de l’expansion de cette offre. Selon l’OFDT, alors qu’en 2007, les saisies de résine et d’herbe de cannabis s’élevaient à 37,2 tonnes, dix ans plus tard le chiffre grimpait à 87,2 tonnes. Avec le souci de moderniser une organisation devenue obsolète, l’ancien Office Central pour la Répression du Trafic Illicite des Stupéfiants (OCRTIS) est devenu, en janvier dernier, l’Ofast (Office Anti-Stupéfiants). Présenté comme un nouvel outil pour lutter contre le trafic illicite, l’Ofast change sa méthode de répression pour s’adapter aux nouveaux défis qui sont liés à l’ubérisation du trafic de drogue.

Cet organisme rassemble en effet des gendarmes, policiers, douaniers mais également des magistrats qui travaillent main dans la main et en lien avec les ministères de la Justice et de l’Europe, pour un meilleur partage de l’information et une meilleure coopération entre les services. Comme le souligne, Christophe Castaner, l’Ofast est « une approche transversale avec une coopération opérationnelle – entre l’intégralité des acteurs de la lutte anti-stupéfiants – pour une réponse globale, en profondeur, du réseau international, jusqu’à la cage d’escalier ». En ce début d’année 2020, la répression organisée grâce aux nouvelles méthodes de l’Ofast portent déjà ses fruits. En effet, rien que sur le mois de janvier, l’office a déjà saisi plus d’1,2 tonne de cocaïne, du jamais-vu. 

Paul Dubois-Gance
M2 Cyberjustice

Sources :

  • Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies (OFDT), « Drogues et addictions, données essentielles », Édition 2019, URL : https://www.ofdt.fr/publications/collections/rapports/ouvrages-collectifs/drogues-et-addictions-donnees-essentielles/
  • L’express, « L’Ofast, un nouvel office anti-stup’ pour lutter contre des réseaux organisés et prospères », URL : https://www.lexpress.fr/actualite/societe/l-ofast-un-nouvel-office-anti-stup-pour-lutter-contre-des-reseaux-organises-et-prosperes_2118100.html
  • Ministère de l’intérieur, « OFAST : porter des coups puissants aux cartels », URL : https://www.interieur.gouv.fr/Actualites/L-actu-du-Ministere/OFAST-porter-des-coups-puissants-aux-cartels