Si la loi AVIA était vivement critiquée pour son côté liberticide et ses multiples atteintes à la liberté d’expression, le sujet des réseaux sociaux revient sans cesse dans l’actualité. Les commentaires, les insultes, les bad buzz reviennent régulièrement dans les journaux. Toutefois, en retour, on constate que la menace d’une plainte en diffamation reste une valeur sûre lorsque l’on est confrontée à des mensonges racontés publiquement. Il convient désormais de définir la diffamation afin d’envisager sa répression lorsqu’elle est commise sur les réseaux sociaux.
Pour Alexandre Chombeau, expert en e-réputation, la diffamation est une allégation ou une imputation d’un fait non vérifié qui porte atteinte à l’image d’une personne ; elle peut être insinuée ou déguisée dans la mesure où l’on évoque une personnalité identifiable sans la nommer.
Ces derniers mois, avec les multiples révélations dénoncées directement au moyen d’internet, la question de la diffamation s’est posée. Récemment, certains acteurs américains mais également français ont fait l’objet de dénonciation par des jeunes femmes comme ayant été victime de violences sexuelles de leur part. Si la libération de la parole des femmes est plébiscitée, cette libération se confronte à l’infraction de diffamation. En l’absence de condamnation pénale, le fait de dénoncer autrui comme ayant commis tel ou tel délit/crime peut être considéré comme une diffamation. La présomption d’innocence doit perdurer, les réseaux sociaux n’ayant pas vocation à jouer le rôle d’un tribunal.
La diffamation agit donc ici comme un rempart contre les abus des uns des autres. Celui qui, à tort, diffuse des propos portant atteinte à autrui sans véritable preuve, se rendra coupable de diffamation. Sur ce point, la peine encourue entend dissuader les internautes : si elle ne demeure que contraventionnelle si elle est non publique, elle deviendra un délit lorsqu’elle est publique. Or, il est admis que la diffamation sur un réseau social ne peut être que publique.
Pour l’avocate Alexandra Hawrylyszyn, « dans une décision du 19 novembre 2010, le conseil de prud’hommes de Boulogne Billancourt a confirmé que facebook n’appartient pas à la sphère privée en estimant que les propos publiés sur un «mur facebook» constituaient bien une preuve licite de faute grave de la part de salariés et justifiaient ainsi leur licenciement. Le conseil de prud’hommes relève dans sa décision que les paramètres choisis du compte facebook permettaient un accès ouvert à la page en cause, notamment par les salariés et anciens salariés de l’entreprise ».
Dès lors, selon son analyse, « la jurisprudence estime généralement que la diffusion litigieuse sur le réseau internet, à destination d’un nombre illimité de personnes nullement liées par une communauté d’intérêts, constitue un acte de publicité commis dès que l’information a été mise à la disposition des utilisateurs éventuels du site ».
La peine encourue dans une diffamation publique dépendra de plusieurs facteurs selon Maître Avi Bitton. On comprendra bien évidemment que la personnalité et les conséquences sur la vie professionnelle/personnelle de la personne prétendument diffamée feront l’objet d’une analyse par les juges afin de déterminer le montant de la peine.
Aussi, il ressortira de ces éléments qu’il convient de prêter une attention particulière aux propos que l’on entend dénoncer sur Internet, notamment si l’on souhaite identifier une personne.
Caroline LISANA
M2 Cyberjustice 2019/2020
https://www.village-justice.com/articles/delit-diffamation,33694.html