You are currently viewing L’encadrement juridique des voitures autonomes

« Un jour les voitures se conduiront toutes seules » voilà une phrase que tout amateur de science-fiction a déjà prononcé. Et étonnamment, l’évolution des dernières technologies en la matière introduit la possibilité d’un monde où les véhicules ne possèderont plus de conducteurs. On peut d’ores et déjà imaginer une multitude de voitures “sans chauffeurs” sur les routes. Mais qu’en  serait-il de la responsabilité  en cas d’accident de la route ? La voiture pourrait-elle être responsable ? Serait-ce au conducteur passif présent dans le véhicule  d’assumer toute responsabilité ? Serions-nous dans le terrain de la responsabilité civile ou pénale ?

Face à la multiplication des expérimentations de ces nouvelles technologies annoncées comme étant le « symbole de l’évolution future de la mobilité », les Nations Unies ont adopté la première norme internationale sur l’automatisation des véhicules. En effet, les leaders en la matière (Tesla, Ford, Uber, Cruise, Argo AI…) ne cessent de développer « leur système automatisé de maintien de la trajectoire » (Automated Lane Keeping Systems). Leur objectif commun est  d’introduire sur le marché de l’automobile les premiers modèles fonctionnels de niveau 4 (où l’autonomie totale se limite à des conditions prédéfinies), sachant que de nombreux véhicules déjà présents sur le marché sont considérés de niveau 3 (dans lequel le conducteur doit être en capacité de reprendre le contrôle à tout moment). Tous étant dans l’optique d’atteindre un niveau 5, où plus aucune intervention humaine ne serait nécessaire.

De ce fait, suite à l’annonce de l’ONU, ces voitures dotées de système automatisé, ne pourront être activées que sur des routes où les piétons et cyclistes sont interdits, ne pourront pas dépasser les 60km/h, et devront posséder une boîte noire. Cette réglementation devrait être effective dès janvier 2021.

Certes, on observe une volonté d’encadrement de cette nouvelle technologie, mais qu’en est-il en France ? 

L’Union Européenne va adopter peu à peu ces nouvelles normes via l’application d’ordonnances. En France, la législation des véhicules autonomes a pris du retard. Aucun texte ne prévoit donc concrètement l’encadrement juridique de ces nouveaux véhicules. Ainsi, pour trouver le responsable lors d’un litige impliquant l’un d’entre eux, il faut s’intéresser à la loi du 5 juillet 1985 sur les véhicules terrestres à moteur (VTM). Cette loi a vocation à s’appliquer dès lors qu’un VTM est impliqué dans un accident de la route. Ainsi, la victime du préjudice va donc pouvoir poursuivre la responsabilité civile du détenteur du véhicule concerné, pour réparer le dommage causé.

Un décret en date du 28 mars 2018, autorise l’expérimentation de véhicules à délégation de conduite sur la voie publique après autorisation préalable, et indique que : « le conducteur [soit] à tout instant en capacité de prendre le contrôle du véhicule, notamment en cas d’urgence ». L’absence de conducteur humain ne fera donc pas obstacle à la loi de 1985. En effet, la voiture ne possédant pas de personnalité juridique, toute indemnisation se fera par le biais de l’assurance du propriétaire du VTM impliqué dans l’accident, car il en est le gardien légitime.

Cependant, quelles solutions sont envisagées en cas d’infraction à la loi ? 

La loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi PACTE, a introduit pour la première fois la responsabilité pénale des voitures autonomes. Elle énonce que les accidents intervenant pendant l’expérimentation de ces derniers ne pourront pas permettre une poursuite de la responsabilité pénale du conducteur, à partir du moment où « le système de délégation de conduite a été activé conformément à ses conditions d’utilisation, qu’il est en fonctionnement et qu’il informe le conducteur en temps réel être en état d’observer les conditions de circulation et d’exécuter sans délai toute manœuvre en ses lieu et place ». Par conséquent, la responsabilité pénale sera transférée au titulaire de l’autorisation d’expérimentation.

Suite à l’adoption de la Loi Mobilité à la date du 24 décembre 2019, on apprend que les véhicules autonomes vont connaître une législation évolutive, qui sera donc définie par plusieurs ordonnances à venir, mais sans aucune date prévue. On regrette que  la responsabilité relative à l’utilisation de ces voitures n’aie pas été évoquée concrètement, mais sera probablement étudiée au fur et à mesure des avancées technologiques. En attendant, la loi de 1985 reste une référence concernant la responsabilité des accidents impliquant un VTM équipé ou non de l’ALKS.

En conclusion, la fulgurante montée en puissance de ces technologies était inattendue, ce qui laisse place à un vide juridique qui peine à se mettre à jour. De cette manière,  les acteurs concernés donnent l’impression ne pas s’impliquer davantage à ce domaine, qui évolue de façon exponentielle. Laissant donc penser que la question de la responsabilité n’est pas à l’ordre du jour.

Et pourtant, l’arrivée des premières navettes autonomes a débuté …


ZERGUI Abdelmalik 

Master 2 Cyberjustice – Promotion 2020-2021

Sources :

https://www.futura-sciences.com/tech/definitions/voiture-autonome-voiture-autonome-15601/

http://www.lerepairedesmotards.com/actualites/2020/reglementation-internationale-vehicules-autonomes.php

La responsabilité pour les accidents causés par une voiture autonome

Accident avec une voiture autonome : qui est responsable ?

https://www.efl.fr/actualites/affaires/themes-divers/details.html?ref=ui-3e19cb1c-b7f9-4dbe-ba37-c2ab66bf726c 
https://www.journaldunet.com/economie/transport/1211317-loi-mobilites-decrets-ordonnances-retard-coronavirus/

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