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Ces dernières années, l’actualité a été marquée par des « bad-buzz » touchant certaines marques par la faute des salariés. Le dernier en date est l’affaire du Slip français. Certains des employés se sont retrouvés pour faire une soirée que certains ont qualifié de raciste puisqu’il y a eu des blacks face lors de la soirée. Très rapidement, les réseaux sociaux se font enflammés et le Slip français a été contraint de réagir. La marque a donc indiqué avoir pris des sanctions à l’encontre des personnes concernées. Il y a également eu l’affaire de l’employé municipal de Paris, pris en photo à son insu, conduisant à son licenciement car il y a eu une publication sur les réseaux sociaux qui a pris une ampleur considérable. La question désormais est de savoir si ces sanctions sont légitimes car les faits relèvent de la vie privée des salariés ?

Toute personne a droit au respect de sa vie privée. La vie privée est protégée par l’article 9 du Code civil mais également par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Le salarié est également couvert par cette protection : sa vie privée, y compris sur son lieu de travail, doit être protégée. Toutefois, il y a des limites, qui peuvent conduire à des sanctions pour des propos et des faits qui relèveraient, à première vue de la vie privée.

Dans un arrêt de la Cour d’appel de Nantes, les juges ont estimé que « le contenu diffusé par un salarié sur Facebook peut causer un tort à l’entreprise même s’il ne vise pas cette dernière et fonder un licenciement » [1]. En concluant ainsi les juges confirme qu’un salarié peut être licencié pour des propos tenus sur Facebook et marque donc ainsi une limite dans la liberté d’expression du salarié.

Par exemple, dans une affaire, une salariée avait publié des propos désobligeants à l’encontre de sa société sur Facebook. Les juges ont donc validé le licenciement car « la salariée avait outrepassé les limites de sa liberté d’expression, porté atteinte à la réputation de son employeur, et incité ses collègues à la rébellion. Ses propos constituaient donc un motif réel et sérieux de licenciement » [2]. Toutefois, les condamnations sont dénuées de fondement si celles-ci ont lieu sur un réseau privé, de manière confidentielle. Si les propos sont tenus dans un groupe Facebook restreint, les juges ne retiendront pas le licenciement [3]. 

La protection des intérêts de l’entreprise entre également dans l’équation. Sur ce fondement, il est possible pour l’employeur de prendre des mesures de licenciement dès lors que les faits commis dans la vie privée mais ayant un impact direct sur l’entreprise sont connus. C’est ici que nous nous rapprochons des cas mentionnés plus haut : le Slip français, l’employé de la municipalité de Paris, ou également le directeur d’un groupe de parfumerie qui avait tenu des propos à caractère raciste sur son réseau personnel. Toutefois, ce ne sera pas un licenciement pour faute mais un licenciement pour trouble objectif. La nuance est importante car si l’employé est licencié pour trouble objectif, il ne perd pas son droit d’obtenir les indemnités. A l’inverse d’un licenciement pour faute. 

La réponse est donc positive. Oui, on peut être licencié pour des faits relevant de notre vie privée et qui ont été publiés sur les réseaux sociaux dès lors que l’image de l’entreprise est touchée. 

Il faut néanmoins mesurer ces jurisprudences. Le droit du travail évolue très régulièrement. Au regard de l’utilisation des réseaux sociaux et du numérique, le droit du travail devrait être amené à évoluer dans les prochaines années. En ce sens, la question d’une photo d’un employé diffusé sans son consentement sur les réseaux sociaux et qui a entrainé son licenciement devrait trouver réponse lors d’une audience du 9 juin 2020. En effet, la question est de savoir s’il est légitime de licencier un individu pour seul motif une photo que l’on ne peut dater et dont le contexte est flou. L’employeur a-t-il commis une faute en licenciant ? Réponse à venir. 

Caroline LISANA
M2 Cyberjustice – Promotion 2019-2020

Sources : 

[1] : CA Rouen 26 avril 2016, n°14/03517

[2] : CA de Besançon du 15.11.11, n° 10/02642

[3] : Cass.soc., 12 septembre 2018, n°16-11-690 

https://business.lesechos.fr/directions-ressources-humaines/partenaire/partenaire-2352-peut-on-licencier-un-salarie-pour-des-faits-tires-de-sa-vie-personnelle-point-sur-la-jurisprudence-333916.php#xtor=CS1-35

https://www.village-justice.com/articles/salaries-reseaux-sociaux-fait-point,28408.html

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