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Une intelligence artificielle peintre : le projet the Next Rembrandt, musicienne : Daddy’s Car ; une intelligence artificielle écrivaine : Ross Goodwin ou encore scénariste : l’IA Benjamin, de plus en plus d’IA se mettent aux services de la création, mais dès lors : 

  • Quelle place donner aux robots ou à une IA au sein de la culture ? 
  • Un robot, une IA peuvent-ils être auteur d’une œuvre d’art ? 
  • Un robot, une IA peuvent-ils détenir des droits de propriétés intellectuelles ?  

    Là où les anciennes générations de robots se cantonnaient à un usage simple, peu autonome, la troisième génération de robots dits les robots intelligents se caractérisent par leurs émancipations vis-à-vis de leurs concepteurs et par leur autonomie. Cette nouvelle génération de robots est donc détentrice d’une intelligence que l’on qualifie d’intelligence artificielle. Il faut noter que l’organisation internationale de normalisation (ISO) définit l’intelligence artificielle dans sa norme  ISO 2382-28 comme la « capacité d’une unité fonctionnelle à exécuter des fonctions généralement associées à l’intelligence humaine, telles que le raisonnement et l’apprentissage ».

    En effet, grâce à l’usage croissant de l’apprentissage profond ou deep learning, les robots apprennent par eux-mêmes. Cette technique s’inspire du fonctionnement des réseaux de neurones du cerveau, par des réseaux de neurones artificiels. A chaque étape le programme reçoit les informations, apprend et se réajuste. A l’instar, des élèves ou des étudiants, l’usage du deep learning fait évoluer le robot par l’apprentissage, il devient donc presque un « robot-élève », « une IA studieuse » en quête d’autonomie, d’apprentissage et cherchant à transformer ses erreurs. Ainsi, le deep learning est la technique à l’origine de la création d’œuvre d’art par l’intelligence artificielle. 

    Traditionnellement, la création d’œuvre implique une œuvre de l’esprit : originale et mise en forme de manière concrète. La mise en forme n’est pas complexe à appréhender même pour des logiciels créateurs, de même l’intégration de l’aléa dans la programmation des robots leur offre le caractère créatif nécessaire. Le robot, usant du deep learning, crée seul sans rapport avec la programmation initiale. Dans cette même idée, les chercheurs ont pu constater que des robots programmés de manière identiques, possédant le même algorithme réalisaient des produits différents. 

    Toutefois, il faut relativiser cet engouement. D’une part, la législation relative à l’originalité des œuvres de l’esprit varie selon les pays concernés, certaines législations étant plus restrictives quant à la notion d’œuvre de l’esprit.
À titre d’exemple, les États-Unis ou l’Australie ne consacrent la notion qu’en présence d’une intervention humaine sur l’œuvre. D’autre part, au regard de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et de son arrêt Painer du 1er décembre 2011, la notion d’originalité consiste en une création intellectuelle de l’auteur reflétant la personnalité de ce dernier.
Cette création se manifeste par des choix libres et créatifs de celui-ci. Ces trois critères composant l’œuvre de l’esprit sont difficilement applicables à un robot. Leur esprit n’est pas, de même ils ne possèdent pas de maîtrises conscientes de leurs processus créatif.  A contrario du créateur-humain, le robot ne peut se prévaloir des droits de propriété issus de son œuvre.  

    Néanmoins, il faut garder à l’esprit que derrière chaque robot, et plus globalement derrière chaque intelligence artificielle, existe un Homme. Tant que des Hommes se trouveront en amont de la machine ces notions resteront « intra-humaines ».
À l’inverse, dès lors qu’un robot deviendra totalement autonome, capable d’agir indépendamment de l’action humaine, détenteur de sentiments propres et donc se rapprochant de plus en plus des Hommes, à l’image du robot NS5 Sonny dans le film I.Robot, la notion d’œuvre de l’esprit tendra à s’appliquer à « l’artiste robot ». Ce bouleversement engendrera sans doute nombre de controverses, transformera nos concepts traditionnels, mais aussi la société en général. 


Manon Dansac
Master 2 Cyberjustice – promotion 2018-2019

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