You are currently viewing La géolocalisation par GPS des salariés: protection des données personnelles et de la vie privée


Au travail, les dispositifs de surveillance se multiplient. Grâce aux innovations technologiques, de nombreuses entreprises ont recours à la géolocalisation de leurs salariés grâce à des dispositifs peu onéreux et très efficaces.

La géolocalisation est une technique qui permet à l’employeur de prendre connaissance de la position géographique des employés, à un instant donné ou en continu.

Ces procédés sont utilisés par des entreprises dont les salariés sont mobiles tels que les taxis, les transports, ou encore les commerciaux. Ce type de surveillance est pourtant très intrusif et est susceptible de porter atteinte aux droits fondamentaux des salariés. Il est nécessaire de faire un travail d’équilibre entre intérêts légitimes de l’entreprise, protection de la vie privée du salarié et principes fondamentaux du droit du travail. 



La géolocalisation par GPS : pourquoi ?

Plusieurs buts peuvent être poursuivis lorsqu’une entreprise décide de géolocaliser ses salariés.
En premier lieu, assurer la sécurité de l’employé, des marchandises ou des véhicules dont il a la charge.  Cela permettra par exemple de retrouver le véhicule en cas de vol ou d’assurer la sécurité des convoyeurs de fonds. Ensuite, la géolocalisation peut servir à justifier et facturer une prestation de transport de personne ou marchandises liée à l’utilisation du véhicule.
Enfin, la géolocalisation peut servir à contrôler le respect des règles d’utilisation d’un véhicule.
Rarement, elle peut servir à suivre le temps de travail, lorsque cela ne peut être fait par aucun autre moyen.



La géolocalisation : collecte, conservation et traitement des données personnelles 

La géolocalisation par GPS permet à l’employeur de suivre en temps réel le positionnement d’un véhicule appartenant à l’entreprise et mis à la disposition du salarié. 

Ainsi, la principale donnée collectée par les systèmes de géolocalisation est relative au positionnement du véhicule puisque la position du véhicule à un instant donné sera affichée sur une carte. Cette donnée peut être associée à d’autres données tels que l’itinéraire, les temps d’arrêt ou encore la vitesse moyenne.

Comme ces données sont relatives à un employé identifié puisqu’on sait quel employé conduit tel véhicule, le système de géolocalisation GPS constitue un traitement de données à caractère personnel. 

La nature des données personnelles collectées doit être établie en fonction de la finalité du dispositif. La CNIL donne donc diverses recommandations. 
Par exemple, il convient de ne pas prendre en compte la vitesse en temps réel du véhicule mais simplement la vitesse moyenne. La géolocalisation ne doit pas non plus être utilisée pour contrôler en permanence un salarié. 

En outre, pour permettre une protection des données efficace, l’entreprise devra déterminer les personnes qui seront habilitées à traiter les données personnelles collectées. L’accès aux informations  du dispositif doit donc être limité.

Sauf exception, le nom du conducteur d’un véhiculé équipé ne doit pas être communiqué à un client puisque cette information ne présente pas d’intérêt pour ces personnes. 

Afin d’éviter que des personnes non habilités accèdent aux informations du dispositif de géolocalisation par GPS, il faut prendre des mesures de sécurité en mettant en place un système d’identifiant et de mot de passe ainsi qu’une sécurisation des échanges. 

Quant à la conservation de ces informations, la durée maximale est de deux mois. Il y a une exception concernant l’optimisation des tournées ou la conservation à des fins de preuves des interventions effectuées qui limite à un an la conservation de ces informations. Si elles sont utilisées pour suivre le temps de travail du salarié, elles peuvent êtres conservées 5 ans. 



Le contexte de mise en conformité des pratiques de géolocalisation des entreprises au regard du règlement général à la protection des données personnelles

Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionné au but recherché, selon l’article L1121-1 du Code du travail. 

Ensuite, il résultait de l’arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 3 novembre 2011 que l’utilisation du système de géolocalisation n’est licite que lorsque ce contrôle ne peut être fait par un autre moyen et n’est pas justifié lorsque le salarié dispose d’une liberté dans l’organisation de son travail. En outre, le système de géolocalisation ne peut être utilisé par l’employeur pour d’autres finalités que celles déclarées à la CNIL et portées à la connaissance des salariés. 

L’article 4 du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) définit la donnée personnelle comme toute information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable.  

Depuis son entrée en vigueur le 25 mai 2018, la mise en place de la géolocalisation ne nécessite plus d’effectuer une déclaration auprès de la CNIL. Aujourd’hui, le responsable du traitement des données est responsable de sa mise en conformité. Il lui appartient de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la protection des données.



La protection de la vie privée du salarié 

Une différence fondamentale doit être faîte entre les véhicules de fonction et les véhicules de société. Ainsi, concernant les véhicules de fonction, ils doivent être équipés d’un interrupteur qui permet de désactiver le système et de préserver leur vie privée. 
En outre, il est nécessaire d’envisager le même procédé pour des véhicules de société pour lesquels l’employeur tolère l’utilisation du véhicule pour rentrer au domicile une fois les heures de travail effectuées. 

L’employeur peut voir le nombre ou la durée des désactivations et pourra ainsi demander des explications au salarié conducteur du véhicule s’il remarque d’éventuels abus. 

Les employés peuvent s’opposer à l’installation d’un dispositif de géolocalisation dans leur véhicule professionnel dès lors qu’ils remarquent que les conditions posées par la CNIL ne sont pas respectées.  Les employeurs doivent donc avoir l’information de l’installation de ce dispositif dans leur véhicule. 

De plus, un accès doit leur être donné concernant les données récoltées par l’outil de géolocalisation. 



Les obligations préalables des employeurs

Tout d’abord l’employeur doit consulter les instances représentatives du personnel avant toute installation d’un dispositif de géolocalisation. Ensuite, il doit informer le salarié de manière individuelle sur la finalité du système, les données collectées et traitées, la durée de leur conservation, l’identité du responsable de traitement, son droit d’opposition pour motif légitime, ses droits d’accès et de rectification. L’information au salarié peut se faire par le moyen d’un avenant au contrat de travail ou encore d’une note de service. 



Recours en cas non-respect des critères de mise en place

Si vous vous retrouvez dans le cas ou un dispositif de géolocalisation ne respecte pas ces règles, vous pouvez saisir le service des plaintes de la CNIL, les services de l’inspection du Travail ou encore le procureur de la République. Des sanctions pourront être appliqués en cas de non respect. Les articles 226-1 et suivants du Code pénal traitent de l’atteinte à la vie privée. 

La CNIL dispose d’une panoplie de mesures tels que le prononcé d’un rappel à l’ordre, la limite temporaire ou définitive d’un traitement, la suspension d’un flux de donné ou encore l’amende administrative. 



Sophie FOISSET
Master 2 Cyberjustice – promotion 2018-2019


Sources : 
Photo: https://fleetgo.fr/bouton-vie-privee/
Article L.1121-1 du Code du travail  concernant le droit des personnes et les libertés individuelles
Article L1121-3 et L1222-4 du Code du travail concernant l’information des salariés
Article L2323-47 du Code du travail concernant l’information du comité d’entreprise 
Arrêt C.cass ch soc. 3 novembre 2011
Informations sur le site de la CNIL

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